Dans son ouvrage, Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, Giorgo Vasari, l'inventeur du terme Renascità ( #Renaissance ), présente Michel-Ange comme l'apogée du la renaissance de l'art débutée à Florence avec Giotto. Il est vrai que durant les 89 ans de son existence (1475-1564), Michel-Ange a marqué de son empreinte indélébile la peinture (le plafond de la chapelle #Sixtine, le Jugement dernier...), la sculpture (la #Pietà, le #David, ...), l'architecture (la place du capitole, la cathédrale Saint-Pierre...) et même la poésie. Son art a inspiré le #maniérisme et Auguste Rodin.
UN ARTISTE PRÉCOCE
Michel-Ange est né en Toscane, près d'Arezzo, à Caprese, dans la République de Florence déjà sous domination de la famille Médicis. Il est le 2e fils d'une fratrie de cinq garçons et sa famille, les Buonarroti, appartient au patriciat florentin, son père est podestat (magistrat) d'Arezzo et de Caprese mais a connu des revers de fortune. Michel-Ange perd sa mère à l'âge de six ans et son père se remarie. Après avoir étudié la grammaire auprès de Francesco da Urbino, Michel-Ange se tourne vers la peinture et le sculpture contre la volonté de son père.
À l'âge de 13 ans, il entre comme apprenti pour trois ans dans l'atelier de Domenico Ghirlandaio (auteur des fresques de la chapelle Sassetti et Tornabuoni à Florence, et de fresques sur les murs de la chapelle Sixtine). Le tourment de Saint-Antoine, copié d'une estampe de Martin Shnongaur réalisé par le jeune apprenti montre la précocité de son talent. Il fait aussi la connaissance de Laurent de Médicis (Laurent le Magnifique) qui le loge dans son palais, et poursuit son apprentissage dans le "jardin de Laurent" où il fait la connaissance d'humanistes comme Ange Politien, Marsile Ficin ou Jean Pic de la Mirandole qui l'initient aux idées néoplatoniciennes, et où il réalise ses premières sculptures (une Vierge à l'escalier, une bataille de centaures).
Michel-Ange, petit et musculeux, a un caractère irascible: lors d'une querelle avec un autre apprenti sculpteur de trois ans son aîné, Pietro Torrigiano, ce dernier lui casse le nez.
À la mort de Laurent le Magnifique en 1492, Michel-Ange retourne près de son père puis est hébergé au monastère Santo Spirito où il est autorisé à étudier l'anatomie en disséquant les cadavres. On peut encore admirer le crucifix qu'il a réalisé pour l'église Santo Spirito de Florence à l'âge de 17 ans.
En 1494, Savonarole, un moine dominicain venu de Ferrare, commence à menacer les Médicis dont il condamne le goût du luxe et l'indifférence aux pauvres. Si Michel-Ange est d'abord séduit par les sermons enflammés du frère prêcheur, il se rend bientôt compte qu'il pourrait être pris pour cible comme artiste ayant été protégé par les Médicis. Il quitte donc la République de Florence et se rend à Venise.
UN ARTISTE DE GÉNIE COURTISÉ PAR TOUTES LES COURS D'ITALIE
Michel-Ange se rend ensuite à Bologne où il séjourne un an, de 1494 à 1495, puis revient à Florence, avant de se rendre à Rome à l'appel du cardinal Riario. Il y sculpte un Bacchus, mais surtout une Pietà monumentale pour le compte du cardinal français Groslaye de Villiers (abbé de Saint-Denis et ambassadeur de Charles VIII auprès du pape). Cette Pietà est réalisée dans un seul bloc de marbre de Carrare (Michel-Ange allait lui-même choisir les blocs qu'il souhaitait) et doit orner un monument funéraire en l'honneur de Charles VIII dans la chapelle Santa Petronilla (dans l'ancienne basilique Saint-Pierre). La Vierge y apparait extrêmement jeune afin de souligner sa pureté et sa virginité. L'artiste n'a pas cherché la vérité anatomique puisque Marie et Jésus, si ils étaient debout, mesureraient respectivement 2 mètres 20 et 1,75 mètre. On a déjà l'une des caractéristiques de l'art de Michel-Ange que l'on retrouve ensuite dans le maniérisme, le non-respect volontaire des proportions anatomiques pour donner plus de force et d'expressivité aux personnages. Il s'agit aussi de la première oeuvre d'art signée, puisque un bandeau porté en écharpe par la Vierge porte l'inscription latine: "Michael A(n)gelus Bonarotus floren(tinus) facieba(t)" (Michel-Ange Buonarroti le Florentin l'a fait).
En 1501, après un bref détour par Sienne, Michel-Ange revient à Florence où il réalise, en trois ans, pour la cathédrale Santa-Maria del Fiore, une statue colossale (5 mètres de haut) en marbre de David. Ce nouveau chef d'oeuvre est interprété comme un symbole républicain face à la tyrannie des seigneurs. La statue est transférée sur la place de la Seigneurie, devant le Palazzo Vecchio, au centre de la ville. En 1873, la statue est transférée à la Galerie de l'Académie pour être protégée de la pluie, tandis qu'une réplique est installée sur la place en 1910.
C'est à la même époque que Michel-Ange peint le Tondo Doni, une des premières peintures considérée comme maniériste aussi bien par la juxtaposition de couleurs vives que par l'allongement des formes; et qu'il sculpte le Tondo Pitti, où un Saint Jean-Baptiste, à peine esquissé, est le premier exemple de "non-finito" (une sculpture volontairement inachevée).
Michel-Ange est alors considéré, avec Léonard de Vinci, comme le plus grand des artistes florentins. La République de Florence leur confie donc à tous les deux la décoration de la Salle des Cinq-Cents du Palazzo Vecchio. Chacun se voit confier la mission de réaliser une fresque représentant une bataille sur un mur de sept mètres de haut: Michel-Ange doit représenter la bataille de Cascina (une victoire sur les Pisans en 1364), tandis que Léonard de Vinci se voit confier la bataille d'Anghiari (une victoire face aux Milanais en 1440). La rivalité entre les deux génies de la Renaissance est telle, qu'ils se disputent et en arrivent aux mains. Le projet tombe à l'eau, heureusement il reste des copies des cartons réalisés avant la fresque (une copie de Sangallo pour la bataille de Cascina, et une copie de Rubens pour la bataille d'Anghiari).
UN GÉNIE AU SERVICE DU PAPE JULES II (1505-1515)
En 1503, Giulio Della Rovere est élu pape sous le nom de Jules II, il veut laisser sa marque et faire de Rome la plus belle ville de la chrétienté en s'entourant des plus grands artistes de son temps: Raphaël, Sangallo, Bramante et bien sûr Michel-Ange. L'artiste florentin arrive à la cour pontificale en 1505 et se voit confier la réalisation d'un mausolée en l'honneur de Jules II. Le projet de Michel-Ange est monumental, il veut réaliser plus de 40 statues de personnages plus hautes que de nature. Le pape lui donne son accord et l'artiste se rend dans les carrières de Carrare pour choisir et acheter le marbre, mais à son retour Jules II a d'autres projets: reconstruire la basilique Saint-Pierre et faire la guerre à Pérouse et Bologne. Michel-Ange quitte Rome et se réfugie à Florence. Devant l'insistance du pape, il le retrouve à Bologne et réalise une statue de bronze monumentale de Jules II qui n'a pas été conservée (le duc de Ferrare, Alphonse Ier d'Este, l'a fondu pour en faire une bombarde).
Michel-Ange se voit ensuite confié le plafond de la chapelle Sixtine: en quatre ans, le génie florentin peint, sans l'aide d'apprenti, 500 m2, 350 figures individuelles (des prophètes de l'Ancien Testament et des sybilles) autour de scènes de la Genèse dont la très célèbre Création d'Adam. À la Toussaint 1512, Michel-Ange a terminé ce chantier dantesque à la stupéfaction générale, le pape Jules II meurt quelques mois plus tard.
Bien que le pape Jules II soit mort, sa famille demande à Michel-Ange de terminer son tombeau en revoyant à la baisse les ambitions initiales. Après deux nouveaux projets entre 1513 et 1516, le sculpteur termine la commande de Jules II en 1545 (40 ans après la 1er commande!) par un cénotaphe qui se trouve dans l'église Saint-Pierre aux liens. Le Moïse recevant les tables de la Loi qui orne le cénotaphe a été sculpté entre 1513 et 1516: il porte des cornes en raison d'une mauvaise traduction de l'hébreu dans la Vulgate (la version latine de la Bible) où le mot hébreu karnaïm est traduit par cornes, au lieu de rayons de lumières. Quand à l'esclave mourant et à l'esclave rebelle, abandonnés dans le projet final, ils ont été rachetés par le roi de France, François Ier, et se trouvent maintenant au Louvre.
MICHEL-ANGE DE NOUVEAU AU SERVICE DES MÉDICIS (1516-1534)
En 1516, le nouveau pape, Léon X, un Médicis, lui demande de refaire la façade de l'église San Lorenzo, l'église située au coeur du quartier dominée par la famille Médicis. De 1520 à 1534, Michel-Ange travaille de façon discontinue sur la nouvelle Sacristie et notamment sur les tombeaux de Julien et Laurent II de Médicis.
En 1527, la ville de Rome est pillée par les troupes de Charles Quint, les Florentins en profitent pour se révolter contre les Médicis et restaurer une République à laquelle Michel-Ange adhère avec enthousiasme, il est même nommé gouverneur général des fortifications de la ville. En 1530, la ville tombe et les Médicis reprennent le pouvoir.
Le pape Clément VII, encore un Médicis, pardonne au génie et lui demande de réaliser la bibliothèque Laurentienne de Florence et une fresque sur le mur du fond de la chapelle Sixtine à Rome.
MICHEL-ANGE AU SERVICE DU PAPE PAUL III (1534-1545)
À la mort du pape Clément VII, son successeur, le pape Paul III, confirme la commande de ce dernier: Michel-Ange réalise alors l'immense fresque du Jugement dernier (13 mètres de haut et 12 mètres de large). Il n'hésite pas à prendre des licences avec les conventions artistiques qui font scandale: le Christ et représenté nu, jeune, musclé et imberbe, les saints ne portent pas d'auréoles, les anges ne portent pas d'ailes, il n'y a pas de purgatoire (seulement l'enfer ou le paradis) et même la Vierge est représentée dans son plus simple appareil. Des cardinaux demandent que la fresque soit censurée mais le pape Paul III refuse, en 1564 toutefois, peu avant la mort de Michel-Ange, Daniele da Volterra est chargé de couvrir la nudité des personnages, il y gagne le surnom de "Braghettone". Michel-Ange s'est représenté au côté du Christ sous les traits de Saint-Barthélémy (celui qui tient sa peau car son martyr fût d'être écorché vif).
L'artiste réalise aussi les fresques de la chapelle Pauline: le Martyre de saint-Pierre et la Conversion de saint-Paul.
Michel-Ange se fait aussi urbaniste en aménageant la place du Capitole.
MICHEL-ANGE ARCHITECTE ET POÉTE (1546-1564)
À la fin de sa vie, Michel-Ange délaisse la sculpture monumentale et la peinture qui demandent des efforts physiques et se consacre davantage à l'architecture. À Rome, il reprend les chantiers de la basilique Saint-Pierre (initiée par Bramante et achevée par Maderno) et du palais Farnèse, conçoit la Porta Pia et la basilique Santa Maria degli Angeli e dei Martiri.
Il continue néanmoins à sculpter, notamment une série de Pietà inachevées: la Pietà Bandini qui devait décorer son tombeau, et la Pietà Rondanini retrouvée lors de l'inventaire après décès survenu le 18 février 1564, à l'âge exceptionnel pour l'époque de 89 ans.
Soixante après sa mort, ses poèmes sont publiés : il y est question de la pénibilité de son travail, de son amour de l'art et de ses désirs homosexuels (notamment pour un certain Tommaso dei Cavalieri, de 34 ans son cadet).
Plus de cinq siècle après sa naissance, Michel-Ange incarne encore la démesure d'un génie sans limite.
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